Mon partenaire me touche très rarement le sexe, ne m’a jamais fait de cunnilingus

Bonjour, j’ai 25 ans, je n’arrive à me libérer sexuellement. Pourtant, je suis féministe, je suis consciente des normes et des valeurs relayées par la société.. Je lis des livres, des articles, regardes des films, je m’intéresse et je m’informe, j’en discute avec mes ami(e)s et autres personnes. Pourtant quand je suis dans l’intimité, je ne pipe pas mots, je n’arrive pas à exprimer mes envies de plaisir.
Mon partenaire  n’aime pas en discuter, il me touche très rarement le sexe, ne m’a jamais fait de cunnilingus alors que je m’efforce à lui donner du plaisir.
Je me pose des questions sur mon corps, sur son désir.. Je m’en veux car c’est en total contradiction avec mes revendications ..
Comment faire pour être libre avec mon corps, éprouver du désir avec l’autre, ne plus réfléchir,  ressentir l’acte sexuel et non plus le penser ?

Bonjour!

Première réaction en lisant ta question: je me demande ce que tu entends par te « libérer sexuellement », et en poursuivant je pense que c’est essentiellement une libération de la parole sur la sexualité que tu sembles désirer ou qui parait te manquer, notamment avec ton partenaire.

Je comprends pourquoi tu évoques le féminisme, le fait que tu sais quelles normes et valeurs nous sont inculquées plus ou moins explicitement et consciemment, que tu t’informes, lis et échanges avec tes ami⋅e⋅s etc… Mais dans de nombreux domaines, et peut-être particulièrement dans ceux du rapport à son corps et sa sexualité et à son/sa/ses partenaire⋅s, le fait de comprendre la théorie sur les enjeux et injonctions qui nous influencent ne permet pas instantanément de s’en débarrasser et de s’en défaire. Et pour cause, ces tabous et ces normes sont profondément ancrés depuis la naissance, avec des rappels constants tout au long de la vie. S’en libérer est un exercice quasi quotidien, une sorte de gymnastique mentale pour s’entraîner à penser différemment, à ne pas retomber dans les schémas classiques lorsqu’ils sont nocifs pour nous, pour notre estime de nous et notre bien être de manière générale.

Donc déjà mon premier point est : ne t’en veux pas, ne te dis pas « je suis trop nulle de ne pas réussir à m’affranchir des normes » mais plutôt « c’est déjà super cool de m’en rendre compte et d’essayer de travailler dessus, de les remettre en question ».

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Bang bang! J’aurai ta peau norme hétérosexiste!

Ensuite, pour en revenir au souci de communication qu’il semble y avoir entre toi et ton partenaire (au moins au niveau sexuel), il n’y a pas 5000 solutions mais une seule : parler. Ça veut peut-être dire, dans un premier temps, réfléchir à ce dont tu as envie, ce qui te manque dans vos rapports…De la communication, donc, apparemment, mais tu parles aussi de caresses, de cunnilingus, deux pratiques qui sont rares voire absentes et que tu aimerais peut-être plus présentes? Si c’est le cas, tu es tout à fait légitime à en parler à ton partenaire, pas nécessairement comme un reproche genre « tu ne me fais jamais/pas assez de [insère ici le truc dont tu as envie] » mais plutôt sous la forme d’une demande, d’un désir, genre « ça m’excite beaucoup quand tu me caresses, j’aimerais que tu le fasses plus/plus souvent/plus longuement/plus doucement/[insère ici comment tu aimerais que cela change] » ou encore « j’aimerais beaucoup que tu me lèches, que tu passes ta langue sur mes lèvres, que tu appuies sur mon clitoris ». Tu peux aussi passer par des chemins de traverses pour amener le sujet, par exemple « j’ai lu un truc sur le clitoris/l’orgasme/le cunnilingus sur Internet, et ils disaient que [insère ici une transition pour ramener le sujet à VOUS] ». Attention cependant à être très claire et explicite dans ta demande, afin d’être sûre que vous vous compreniez bien et parliez de la même chose :)

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Wait what? Allégorie du malentendu

Si tu n’es pas sûre de ce qui te plaît en la matière, la masturbation ou autoérotisme peuvent t’aider par exemple à sentir si tu aimes plutôt qu’on te touche légèrement ou de manière plus appuyée, avec des mouvement d’avant en arrière, en cercle ou je sais pas moi, en faisant l’alphabet à l’envers du bout des doigts. quand tu repères un point de plaisir, une façon d’être stimulée qui te colle au plafond, c’est aussi une indication que tu pourras donner à ton partenaire qui ne lit pas forcément dans tes pensées ;)

Ça peut paraître hyper impressionnant et flippant de demander une pratique ou de guider son partenaire mais c’est le seul moyen d’être fixée. Tu pourras par exemple voir s’il en tient compte ou pas dans vos rapports suivants. Il est possible que vous en rediscutiez régulièrement et c’est ok, mais s’il te dit qu’il ne veut pas, c’est aussi complètement son droit. A toi après de voir si cela te convient de poursuivre de cette manière (bon, s’il ne touche jamais ton clitoris c’est quand même tendu on va pas se mentir mais bon…) ou si tu veux trouver d’autres solutions (ouvrir votre couple à d’autres partenaires, aller voir ailleurs de ton côté…).

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Fête du slip à tous les étages

Par ailleurs, je me permets de noter l’expression « je m’efforce de lui faire plaisir » qui est intéressante parce qu’entre s’efforcer et se forcer il n’y a parfois qu’une très mince limite. Donc voilà, juste pour rappel : tu n’as pas à faire ce dont tu n’as pas envie (on peut tout à fait avoir très envie de donner du plaisir, hein, mais ton choix de mot n’est pas anodin je crois). La sexualité n’est pas non plus forcément un lieu de troc ou de réciprocité, et le fait que tu pratiques la fellation sur ton partenaire ne l’oblige pas à te faire un cunnilingus « en échange ».

Il n’y a pas de problème avec ton corps. Il n’y a pas de problème avec ton sexe. Il n’y a probablement pas de problème avec le désir de ton partenaire non plus puisque vous avez des rapports sexuels. Vous avez sans doute juste besoin de rétablir la communication, de vous dire ce dont vous avez envie, d’essayer, de vous écouter, de jouer ensemble et de vous faire du bien. Je pense que ce sont de bonnes bases pour réussir à moins te prendre la tête et plus prendre ton pied ;)

Des bises!

[Edit] Sur Facebook, on a commenté ceci ajoute « lire, débattre et savoir c’est top. Mais que ça n’a rien a voir avec le fait de se lâcher au lit (sauf pour le côté connaissance de son corps hyper important). Peut être que trop réfléchir et analyser nuit au plaisir, c’est ce que j’ai observé en tout cas. Et personnellement c’est allé de paire avec un lâcher prise de pleins de choses dans ma vie. Discuter discuter discuter, et laisser venir <3 (et éventuellement tester une contraception non hormonale) Voilà pour mon avis ^^ » Et effectivement, les contraceptions hormonales peuvent avoir un impact important sur la vie sexuelle comme j’en parlais ici et là aussi mais il y a des alternatives!

Cette réponse existe grâce au soutien de @Bach_kun sur Tipeee. Merci beaucoup!

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